1346
: Edouard III d’Angleterre débarque à Saint-Vaast-la-Hougue, brûle
Montebourg et emmène les bourgeois de la ville comme otages (des
chroniques anglaises disent que Montebourg a été épargné) : c’est le
début du conflit franco-anglo-navarrais qu’on appelle la Guerre de Cent
Ans, dans lequel les Montebourgeois comme tous les Normands se trouvent
aux premières loges et connaissent les ruines, les famines, et l’exil.
L’abbaye sert de garnison aux Anglais à partir de 1356. Le bourg est
fortifié et démantelé à chaque fois qu’il change de mains (il reste
aujourd’hui un pan de rempart et une tour de ces fortifications
médiévales en face de la maison de retraite, route de Quinéville). C’est
à cette période qu’est né l’adage “Qui tient Montebourg tient
Cherbourg” qui s’illustrera si explicitement six siècles plus tard, lors
de la bataille des Alliés pour Cherbourg en juin 1944. Montebourg,
point élevé dominant le Cotentin, est le verrou ultime sur la route de
Cherbourg.
1356
: la chevauchée du duc de Lancastre. Le duc de Lancastre et ses troupes
font de l’abbaye leur repère pour une longue chevauchée “razzia” à
travers toute la Normandie en juillet. Il y a au moins un millier
d’hommes dans l’enceinte du monastère. Les Anglais stockent leur butin à
l’Abbaye avant de rembarquer.
1357 : l’abbaye est aux mains du roi de Navarre, Charles le Mauvais, l’allié des Anglais et le suzerain de tout le Cotentin.
1378
: Du Guesclin chasse les Anglais et s’établit à Montebourg. Le roi
Charles V prend la décision de fortifier le bourg. L’Amiral de France,
Jean de Vienne, lui succède. Mais c’est si peu tenable pour le parti
français que, disent les chroniques, on abandonne Montebourg pour se
replier sur Carentan. Le Cotentin est devenu une sorte de no man’s land
dont on a évacué les habitants.
1389 : le prieur de La Bloutière écrit à propos de Montebourg: “les habitants abandonnèrent Montebourg et tout le païs de Costentin, qui pourtant estoit le païs le plus gras du monde“. Tout est désolé. “Le païs a esté vuidé des gens qui y demouroient, et a esté sans riens y demourer l’espasse de 20 ans ou environ”.
Les habitants ne reviennent que peu à peu à partir de 1392. Des
villages du Cotentin resteront encore sans possibilités fiscales pour le
Roi pendant des décennies.
1405 :
nouvelle période noire. En juin, le duc de Lancastre et ses troupes
débarquent. Montebourg est mis à sac, brûlé. Peut-on encore ajouter de
la misère à la misère?
1417
: la Normandie est anglaise pour une génération. Le duc de Bedford qui
la gouverne veut en faire le fleuron français de la couronne. Pour en
former les élites, il fonde l’Université de Caen en 1436, L’Eglise est
plutôt favorable à l’”occupation anglaise”. Mais il y a parmi les
clercs, de solides fidélités au Roi de France. Ainsi, l’abbé de
Montebourg, Guillaume Guérin, se retrouve dans les prisons anglaises
pendant des mois pour “crime de lèse-majesté” à l’encontre du Roi
d’Angleterre.
1440-1450
: la Normandie redevient française. A jamais. Montebourg avec.
L’abbaye, qui a été un foyer actif de la résistance dans les dix
dernières années de l’occupation anglaise, panse ses plaies. La tour de
l’église abbatiale et le chœur sont renconstruits dans le style
“flamboyant” dont un dessin de Gerville en 1817 témoigne.