1545-1562
: foires et marchés de Montebourg vus par Gilles de Gouberville, un
petit seigneur du Val-de-Saire. Son journal témoigne de la forte
activité économique de Montebourg à cette époque. Des chandelles aux
harnais en passant par le suif, le vin et les remèdes, on y trouve tout
ce dont un bon manoir a besoin bon an mal an pour bien se conduire.
1562
: Les Huguenots (qu’on appelle alors les Christandins) investissent le
bourg et pillent l’abbaye. Gilles de Gouberville fait écho de la rumeur
qui les dénombre à plusieurs milliers dans Montebourg.
1585
: L’abbé Bon de Broë fonde la première école à Montebourg dans un
immeuble qui borde la rue des Ecoles (ou rue Verglais, du nom d’un curé
de Montebourg au temps de François 1er). Malgré les bouleversements de
1944, les écoles y sont toujours.
1632
: Saint Jean Eudes prêche une mission et lance la reconquête catholique
à Montebourg: il faut catéchiser pour que les enfants et les adultes
formulent clairement leur foi, donc, il faut leur apprendre à lire et à
écrire, les former moralement et chrétiennement, en même temps qu’il
faut former les prêtres à leur tâche pastorale. Cet état d’esprit se
maintiendra jusqu’à la Révolution laquelle, dans ce domaine ssera
vraiment une cassure à Montebourg.
1680
: Emigration au Canada: une famille de Montebourg, les Rolland,
s’embarque pour la Nouvelle-France, le père et les quatre filles, et y
fait souche. La lignée continue encore aujourd’hui.
Fin XVIIe s. :
L’embocagement commence à se généraliser autour de Montebourg:
c’est-à-dire l’établissement de haies pour enclore les champs, même
cultivés de céréales. les “clos” se transforment insensiblement en
herbages, sur lesquels on développe l’élevage traditionnel de chevaux,
mais aussi de bovins, pour la viende et pour le beurre. L’intérêt
économique du “couchage en herbe” des champs labourés se double d’un
avantage fiscal: on ne perçoit pas de dîme sur l’herbe! L’Abbaye “veille
au grain” pour protéger ses dîmes, mais le couchage en herbe se fera,
inexorablement.
1718
: Pour lutter contre la misère des plus pauvres et pour donner un asile
aux infirmes, aux vieillards et aux enfants abandonnés de Montebourg,
l’abbé, Mgr de Carbonnel de Canisy, ancien évêque de Limoges, fonde
l’hôpital-hospice à l’endroit où s’élève toujours la maison de retraite.
1765-1785
: Montebourg se modifie: on construit la route royale qui va de Paris à
Cherbourg. Les habitants de Montebourg ont envoyé une pétition au Roi
pour que la route passe en plein bourg, au milieu de la place
principale, le Haut-Marché, afin de favoriser les foires et le commerce.
C’est accordé. Il y a bien quelques protestations, notamment celles
d’un ancien officier des armées du Roi qui menace de “fusiller” les
ouvriers s’ils s’attaquent aux murs qui enclosent son logis. On démolit
quelques vieilles tanneries et, à leur emplacement, on construit le pont
qui enjambe la Durance près du lavoir de la Foulerie. La route passe
et, avec elle, le Roi Louis XVI allant inaugurer les cônes de la future
rade de Cherbourg. Très acclamé.
1780
: L’abbé, Mgr de Talaru (qui est évêque de Coutances) affectionne
particulièrement son abbaye qu’il transforme en maison de retraite pour
vieux prêtres. Il n’y avait plus qu’un seul moine, Dom Claude Jacquetin.
Pour donner du travail aux Montebourgeois et aussi aux
Montebourgeoises, il crée un atelier de coutil (dont la réputation se
maintiendra jusqu’au bord du XXème siècle) et un atelier de dentelle.
Mais la Révolution toute proche ruinera en partie ces nouveautés et
l’abbaye elle-même disparaîtra, pierre après pierre, du paysage
montebourgeois.
1789 :
“Le huit mars au son de la cloche”, les habitants se sont assemblés
dans le cimetière pour rédiger le cahier de doléances de la paroisse.
Ils sont une trentaine – des hommes seulement – , dont Jacques Lemor,
René Geoffroy, Jacques-François Leprévost, Louis-Etienne Tardif,
notaire, et Jean Le Saché, désignés pour porter le cahier à Valognes.
Parmi les signataires, il y a des noms qui ont “poussé” jusqu’au XXème
siècle: Hamelin, Féron, Le Berger, Le Cacheux, Agnès, Osmond, Fontaine,
Anfray… Quand les choses se sont gâtées, à partir de la fin 1791, après
l’obligation pour les prêtres de prêter le serment constitutionnel, et
la mise en place à Montebourg des prêtres “jureurs”, les vieilles
familles ont abandonné leurs fonctions municipales et ont subi parfois
des visites domiciliaires. Mais les Montebourgeois ont été plutôt tièdes
révolutionnaires: le district de Valognes insiste, par exemple, pour
qu’on retire la mention “Vive le Roi” qui orne toujours le draperau de
la Garde nationale de Montebourg: nous sommes à l’automne 1793, le Roi
avait été déchu depuis plus d’un an et guillotiné six mois auparavant,
le 21 janvier.
1792-1817 : la destruction de l’abbaye
s’étend sur plus d’un quart de siècle. Les propriétaires successifs ont
fait disparaître les bâtiments monastiques : le cloître, la salle
capitulaire (identifiée comme la chapelle Notre-Dame de l’Etoile, et qui
conservait le tombeau de Richard de Reviers et de plusieurs abbés), le
dortoir, le réfectoire, les appartements du prieur, et surtout l’église
abbatiale, dont la tour a été minée en février 1818, après que Charles
de Gerville ait eu le temps de dessiner ce qui restait de l’abbaye
(dessins conservés à la Bibliothèque municipale Jacques-Prévert de
Cherbourg). Ces bâtiments ont servi de “carrière de pierre”. N’ont été
conservés que des bâtiments utilitaires: le logis abbatial édifié dans
la première cour en 1701 par l’abbé commendataire de l’époque, Mgr de
Carbonnel de Canisy, un autre logis abbatial, plus ancien, construit
sous l’abbatiat du cardinal Guillaume d’Estouteville (fin XVe siècle),
la double porte (XIVe siècle), le colombier, les bâtiments agricoles et
le moulin. Ont été également conservés les murs qui enclosent la
vingtaine d’hectares du domaine de l’abbaye. Et l’étang qui servait à la
fois de réserve de poisson pour les moines et de reserve d’eau pour
actionner la roue du Moulin de l’Enclos.